jeudi 21 janvier 2010

Premier voyage au Pérou

Julien et moi avions la possibilité de partir à l'étranger le dernier semestre de 2009, et la chance fit qu'on ai l'opportunité de faire ça dans la même ville. Nous avons donc choisi le Pérou, puisque ce pays est génial et qu'il y a de quoi faire au niveau de la rando. Le niveau de vie y est de plus très bas ce qui est juste parfait.

Julien est arrivé 1 mois avant moi, et avait prévu qu'on voyage dès mon arrivée. Voici en détail notre premier voyage.


NB : Le texte en italique est de Nico, le reste est de Ju



Chiclayo l’Imprévue

Aussi loin que je me souvienne j’ai toujours tout planifié. Je n’allais pas à un endroit sans avoir une carte ainsi qu’un plan relativement précis de ce que je pourrais y faire, comment y aller, et un timing de chronomètre suisse, ou presque. En arrivant au Pérou, sachant que je me débrouillais plutôt bien pour ce qui est de prévoir, je me suis dit que j’allais essayer ne pas prévoir, afin de savoir si oui ou non je savais également gérer l’imprévu. C’est ce qui s’est passé pour Chiclayo, petite ville dynamique sur la côte Nord du Pérou. Et ça a provoqué tellement de situations incongrues, que je m’en vais tout de suite faire une liste ci-dessous, hors de leur contexte, car de toute façon, il n’y avait la plupart du temps aucun contexte. C’est tout l’intérêt de l’imprévu saugrenu d’ailleurs.

Quand on pense à « voyager à l’arrache », ou sans prévoir en fonction du vocabulaire préféré, on associe souvent le fait d’être en retard, ou juste pile à l’heure, sans aucune marge de manœuvre. Je confirme que c’est faux : nous sommes arrivés pile 1h45 avant le départ de notre bus à la gare routière de Lima. C’était tellement bien pas préparé et vérifié que l’on a du venir nous chercher dans le bus pour nous en faire sortir, car au bout d’un moment (long) le contrôleur s’est rendu compte que nous n’étions pas dans le bon bus. « Permettez, je ne fais que passer. »

Petite parenthèse sur Lima. Cette ville est bizarre. Les transports en commun sont les plus unsafe que j’aurai pu imaginer, mais je les préfère aux transports français car il sont 10 fois moins cher (au moins)et que le temps d’attente est de 0 à 15 secondes. C’est juste magnifique. Autre chose, toutes les activités spécialisées à chaque fois concentrées sur une rue. Par exemple la vente de matelas : une rue avec que des marchands de matelas, mais QUE ça. Même chose pour les ophtalmos, les dentistes, les cours d’anglais, les SPA etc… Bizarre niveau concurrence je trouve. Enfin, les Péruviens sont très affectueux, si bien qu’ils ne peuvent pas résister à l’envie de s’embrasser n’importe où. Jusque là tout va bien, mais il faut voir les amoureux qui s’embrassent sur les bancs publics, bancs publics sur des ronds points, bancs publics au milieu d’une avenue aussi large que champs élysées. C’est beau. )

Pendant l’attente j’ai repéré un mec qui était le sosie de chaouche, trait pour trait, le groooos bad de la mourria del mundo. [chaouche = prof d’éléc/responsable cycle 3 premiers ans pour les nons ECEiens]. Une fois dans le bon bus, soit approximativement 1h37 plus tard, on nous servit un dîner (un deuxième dîner serait plus exact, mais comme le premier avait été ingurgité sur le pouce en se pressant vers la gare, ça ne compte pas). Le tout était passable, mais le dessert était violemment mauvais. Dans un petit pot en plastique blanc, le genre de pot qui ne paye pas de mine, sous un couvercle très bien fermé puisque j’ai tout de même mis deux bonnes minutes à l’ouvrir, une gelée pas tout à fait gélifiée entre transparente et couleur chaire de poire. Pour faire plus simple, et pour reprendre les mots de Nicolas, on aurait effectivement tout à fait dit une substance nasale plus connue sous le nom de morve. Ce fut très mauvais (parce que j’en ai quand même mangé jusqu’à ce que mon estomac dise « stop ! Ou je recrache tout ! »).

Avant de partir, Nico a voulu acheter un lecteur mp3 pour écouter de la musique pendant le trajet, ainsi qu’une deuxième batterie pour son appareil photo. Nous sommes donc allés à Polvos Azules, le plus grand marché noir de Lima. Ici, tous les articles sont originaux : « soit ils sont volés, soit ils sont tombés du camion »…

Premier stand d’appareil photo : « C’est 120 soles minimum pour la batterie, personne ne vous fera moins, je vous le garanti. Déjà je me scie les veines à ce prix là. »

Deuxième stand (2m plus loin) : « c’est 95 soles minimum pour la batterie. C’est le prix le plus bas que je puisse vous faire. » Le tout sans avoir négocié quoi que ce soit puisque notre question était « avez-vous ce modèle ? »


Dans Chiclayo plus qu’à Lima, les gens ne se gênaient pas pour se retourner et observer bouche bée et ostensiblement les deux gringos que nous sommes, et en particulier Nicolas avec sa barbe et ses rangers. Forcément lorsque 95% de la population est imberbe, voir un barbu c’est un peu comme si les conquistadors revenaient tout détruire une deuxième fois.

Sur ce, sans plan, nous trouvons tout de même la place centrale qui n’est pas du tout au centre de la ville, et un point d’information où un transsexuel nous donnera l’adresse d’un hôtel bon marché où loger, ainsi qu’un plan sommaire. Pendant que je me concentrais plus que nécessaire sur le plan que me montrait « la dame », Nicolas ne s’est pas gêné pour prendre une photo. Julien, lui, baddait très fortement, on sentait les trémolos dans sa voix ce qui rendait la situation vraiment drôle, il en a fallut de peu pour que j’explose de rire.


En route vers l’hôtel, nous en croisons d’autres. Afin d’avoir une meilleure idée des prix, nous y rentrons et regardons les chambres. Arrivés dans un troisième hôtel, le prix est de 55 soles la nuit pour une chambre double. C’est très cher, mais cet hôtel possède une chambre de 6 personnes, et nous attendions effectivement 4 autres personnes le lendemain. Argument volume imparable, le prix passe soudainement à 35 soles pour la chambre double, et la chambre pour 6 est à 80 soles la nuit, ce qui est très raisonnable. Nico et moi discutons un peu pour savoir si nous prenons cet hôtel ou pas. Impatient que nous disions oui, le bonhomme accepte sans même prendre le temps de réfléchir lorsque je lui dis que nous prenons la chambre double pour 30 soles la nuit. C’est une réussite, et accessoirement la plus grosse arnaque du siècle car 2h plus tard, je reçois un texto des autres nous signalant que finalement ils ne peuvent pas venir. Le lendemain, lorsque nous indiquons que nous conserverons la chambre jusqu’à dimanche, et que personne d’autre ne viendra, la déception frustrée de celui qui s’est fait avoir se lit sans peine sur le visage du réceptionniste. Pourtant nous étions de bonne foi ! Il était vraiment navré c’était trop bien.

Au marché Modelo, dans la section « sorcellerie /chamanisme », nous avons acheté des feuilles de coca en poudre. Donc là on se dirige vers la sortie et un quidam random nous hêle, « hey vous avez acheté des feuilles de coca, venez j’ai quelque chose qui pourrait vous intéresser ». Il nous emmène à l’abris des regards indiscrets genre derrière sa boutique et nous sort un bocal de poudre. La luminosité étant mauvaise et mes connaissances d’apothicaires maigres, je ne sais pas ce que c’est. Le mec nous dis que c’est du san pedro, un cactus qui pousse dans les déserts en nous sortant que c’est. « Muy bueno para el estomago » nous répéta souvent le vendeur. Tu parles, tout le monde sait que le San Pedro est surtout un cactus hallucinogène, nous en avons donc pris 2 cuillières ! Nous avions ainsi une petite dose chacun, achetée à 50% de réduction (« Buy one get one free ! »). Ce que nous avions oublié de vérifier, c’est la façon dont le consommer, et accessoirement sa force. Là où nous avons été chanceux, c’est que nous n’avons ressenti aucun effet hallucinogène : en vérifiant le lendemain, 28g de San Pedro durent 24h, le tout entrecoupé de vomissements fréquents. Là où nous avons été moins chanceux, c’est que le San Pedro s’est révélé être un puissant laxatif lorsque mal ingurgité. Nous avons donc fait une super laxatif party, c’était top. Au programme, longues séances d’introspection sur le pot, et souvenirs de dingue à raconter à tous ses amis.

Les feuilles de coca se sont également révélées inefficaces malheureusement, mais ça il nous en reste encore pour pouvoir en faire une infusion, comme il est coutume de faire ici. Cependant cela nous a permis de passer pour de vrais amateurs puisque nous les avons utilisé dans un restaurant à l’occasion du petit déjeuner, devant les serveurs et les clients.

Nous souhaitions également visiter le réputé marché artisanal de Monsefu. C’était nul. Je le dis aussi simplement que je le pense. Nous avons galéré 2h dans les transports en commun, perdus au milieu de nul part alors les péruviens se gaussaient ouvertement de nous, pour enfin errer 1h dans une ville déserte avant de tomber sur 3 stands ridicules qui vendaient tous les mêmes bibelots, bibelots que nous pouvons sans problème acheter à Chiclayo même. Acheter ou pas d’ailleurs, car voulant acheter un bracelet « roots » à Laura, notre amie péruvienne, Nico n’a pas pu le payer car le vendeur s’était certainement évaporé à jamais. Il a donc pris la difficile décision de partir sans payer, ce qui me semble être le juste prix pour l’objet en question. Honnêtement pour ma défense on peut dire que je l’ai carrément volé. AAAAAAANNNNNN PAS BIEN

Puis on s’est perdu un temps relativement long dans la ville avant de tomber sur un paysan et sa machette, que nous avons suivi jusqu’à un mototaxi qui nous a arnaqué en nous déposant 3 pâté de maisons plus loin (alors que c’était sensé être à 15 pâtés de maison selon ses dires). C’est moche de mentir. Jeux de mot pas évident bien entendu puisque les ancêtres des habitants de Monfesu étaient une tribu appelée les Moches.





Nous avons également traversé une plage de détritus à Santa Rosa sous le regard carnassier d’un vautour à col rouge. C’était très bien.



Au moment de trouver un tour opérateur afin de visiter les nombreux musées aux alentours, nous tombons sur une personne qui nous avait déjà interpellée la veille. Ca tombait bien, son programme nous intéressait. Watch and learn the ultimate negotiation technic : the « do nothing and let’em drop it down ». La vendeuse a commencé à 50 soles par personne par jour. Puis, au fur et à mesure que nous ne disions rien, mis à part quelques mots en français ou en espagnol sur l’intérêt de son programme, elle baissait son prix. Arrivée toute seule à 20 soles par personne, on lui explique que c’est un prix qui nous convient, et que nous allons juste aller voir une autre agence pour regarder leur programme. Et là elle a paniqué, notre espagnol doit pas être au point et elle a encore baissé le prix toute seule comme une grande. Awesome. Au final, nous avons eu les deux jours pour 35 soles par personne, sans avoir eu à demande une seule réduction. Ca aussi c’était très beau, surtout que nous ne sommes pas revenus le lendemain car son programme était pourri (et que bien entendu nous n’avions payé que la première journée).

A Ferreñafe, Nico a commandé un plat inconnu. Il s’est retrouvé avec un poisson entier qui lui souriait gentiment depuis son assiette, avec toutes ses petites dents, un demi-crabe, et bien entendu du poulpe juteux. Un vrai régal. C’était bon


Samedi soir, c’est discothèque. Après avoir demandé à plusieurs personnes où passer la soirée, toutes sont unanimes : el Premium. Comme dans toutes les discothèques jusqu’alors, la seule musique qui passe est de style latin : salsa, cumbia, reggae ton, etc… On repère trois nanas assises toutes seules à une table et la seule qu’on peut voir est juste belle ce qui suffit en général pour avoir envie de les aborder Donc on y va, on leur paye un verre et on tente de discuter, et comme on n’y arrive pas on les emmène danser, classique. Avec ces trois demoiselles nous nous trémoussons donc vaguement et sans entrain, jusqu’à ce que le DJ passe deux musiques un peu plus dans notre registre habituel. saxo et un autre truc inconnu. Un regard suffit : Nico et moi nous élançons sur l’estrade qui surplombe le dancefloor, et nous commençons sous le regard interdit de la foule une chorégraphie déchainée. Tout le monde s’arrête de danser pour nous regarder jeter les bras et les jambes dans tous les sens en virevoltant. Des connaisseurs auraient même pu déceler quelques mouvements de tektonik. Pas du tout, ah si ça… ok approved. Les gens affluent des autres salles pour nous regarder, les spots ne savent plus où se donner de la tête, et c’est la gloire. euh ??. Lorsque la musique d’arrête, applaudissements généraux (ah ?) et nous allons retrouver les jeunes demoiselles qui sont encore bouche bée. « Voilà comment on danse en Europe. » encore une fois : non, tout le monde ne danse pas comme ça, heureusement d’ailleurs sinon j’imagine pas le massacre. Comme les nanas étaient complètement inintéressante et que ça nous saoulait de danser la salsa on est parti à l’anglaise. C’était très beau.

Nous avons repéré ce qui semblait être un surplus militaire au coin d’une rue. Bien entendu nous nous y précipitons. Je cherchais un chapeau et reluque donc les casquettes de la Police Nationale. Nico penche pour un képi d’officier. Enfin, les polos ne sont pas trop mal. Sauf qu’au moment d’acheter, la vendeuse nous indique que c’est un fournisseur officiel, et donc que nous ne pouvons pas acheter d’items comprenant les logos officiels sans être de la Police ou de l’armée. Cependant, nous pourrions les acheter si d’aventure nous rencontrions un policier qui accepterait de donner son nom pour nous. Qu’à cela ne tienne. Nous sortons de la boutique, entrons dans le commissariat, commissariat bondé de monde qui attendent pour déclarer je ne sais quoi d’ailleurs, et attrapons par la manche le premier policier venu. Avec des mines de chiens battus, non juste des mines de mecs qui ont mal pris du san pedro, nous lui expliquons que nous souhaitons acheter des souvenirs pour quand nous rentrerons en France, mais que la vendeuse refuse de nous les vendre. Ainsi, alors qu’une foule importante attendait son tour, le policier Jon Campos quitte son poste pour venir faire du shopping avec nous. Au final, il nous négociera même le prix, et Nico et moi repartons tout deux avec des beaux habits de la police nationale péruvienne et de l’armée.

Enfin, last but not least, notre visite de la Réserve Naturelle du Chaparri fut épique. Aucun tour organisé n’allait à cet endroit, qui paraissait pourtant extrêmement intéressant. Nous avons donc décidé de nous y rendre par nos propres moyens, à savoir en combi. Arrivés dans un quartier où un passant m’a arrêté pour me dire de ranger ma montre dans ma poche pour que ne me la vole pas, nous montons dans un mini-bus et attendons qu’il se remplisse avant de pouvoir partir. 1h40 de trajet plus tard, après avoir traversé une verte vallée irriguée, entre les champs de canne à sucre, le chauffeur nous lâche dans un bled perdu encaissé entre deux montagnes, dans un désert de rocailles et de cactus. Première question qui nous vient à l’esprit « Que fait-on là ? », et notre deuxième pensée fut pour Molière « Mais que suis-je allé faire dans cette galère ! » Au final, nous trouvons une échoppe dont la tenante connaît un guide qui nous emmènera dans le parc. En l’attendant, nous profitons de l’ombre rafraîchissante de sa boutique. Il fait tout de même 28° à l’ombre, je n’ose imaginer en été ! Puis le guide arrive dans un vieille Ford de 1980 et nous roulons cahin-caha sur une piste en terre à travers la pampa : arbustes desséchés, cactus, pierres et sable. C’est un autre monde, on se croirait dans un safari dans la brousse. La visite a été excellente, cela valait véritablement le coup. Nous nous sommes fait passer pour des activistes écologiques, ou presque, et ça a beaucoup plu à notre guide qui nous a longuement parlé de la région, et des problèmes politiques et écologiques auxquels ils faisaient face. Nous avons pris ses coordonnées, on ne sait jamais.

Quoiqu’il en soit, et pour conclure ce court résumé, notre voyage a Chiclayo fut vraiment très bien malgré le manque cruel d’infrastructures. En effet, comme abordé deux jours plus tard pendant mon cours d’éco-tourisme et d’opportunités économiques, le Pérou promeut très efficacement ses ressources touristiques - Machu Picchu, Iquitos, Chan Chan, Monsefu, Santa Rosa, Chaparri… - mais n’offre aucune infrastructure permettant d’accueillir, ou même tout simplement d’orienter, les touristes. En conséquence, ceux-ci visitent le site, puis repartent sans y rester, et donc sans être un apport économique suffisant pour faire du tourisme une activité économiquement viable. On l’a vu avec la réserve naturelle : c’est un site exceptionnel, qui mérite réellement une attention toute particulière, d’autant que c’est l’unique site de ce type à Chiclayo. Et pourtant, c’est Le salaire de la peur pour s’y rendre, si bien que même les tours organisés ne le proposent pas dans leur programme. Et une fois sur place, le manque d’investissement se fait cruellement sentir : on aimerait pouvoir se promener des heures, voir plusieurs jours, dans ces bois, à la recherche d’ours en liberté par exemple, et l’on se retrouve cantonné à suivre un parcours d’1h30 entouré de grillages où l’on ne nous montre que les animaux en rééducation. C’est dommage de ne pas utiliser pleinement le potentiel de ce site, car il pourrait devenir l’une des activités phares de Chiclayo (pour changer des musées), et par la même soutenir le développement économique de toute la communauté de Chongoyape, qui nous a semblé bien démunie. Encore une fois donc, on constate que le Pérou – tout comme la majorité des autres pays d’Amérique Latine – est assis sur « une mine d’or », mais n’en tire rien.

On m’a servi des pates de poulet !!



Nico et Julien

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